Cela est trop peu connu du grand public, mais plusieurs grandes innovations en technologies médicales sont issues des technologies inventées dans le cadre de la conquête spatiale ou alors directement des expériences effectuées en apesanteur à 400 km au-dessus de nos têtes, ainsi qu’en microgravité.
Prenez l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Si vous avez déjà dû passer une IRM, sachez que vous pouvez remercier les ingénieurs du programme Apollo dans les années 60 qui avaient besoin d’améliorer la qualité des photographies de la surface lunaire en vue de mieux préparer les atterrissages des futures missions. C’est par le traitement numérique des images (traitement assisté par ordinateur) que les ingénieurs ont pu obtenir une meilleure résolution de la surface de notre satellite naturel. Les recherches ont par la suite permis de grandement perfectionner cette technologie pour l’adapter au domaine médical afin de mieux visionner les différents organes et tissus potentiellement atteints. D’ailleurs, cette technologie a aussi été transférée à l’imagerie satellitaire avec le programme Landsat d’observation de la Terre.
De la conquête spatiale à la recherche dans l’espace
Mais les innovations médicales peuvent aussi être le résultat de la recherche scientifique pratiquée directement dans les stations spatiales ou dans les véhicules orbitaux comme les navettes désormais à la retraite. Pour ce qui est des tumeurs du cerveau ou d’autres organes, ce sont des expériences réalisées à bord des navettes spatiales de la NASA visant la croissance des plantes qui ont permis d’améliorer la technique appelée thérapie photodynamique. Celle-ci permet d’activer une molécule dénommée porfimère sodique qui possède des propriétés cytotoxiques, c’est-à-dire qui inhibent certaines fonctions des cellules (par exemple la mitose) sous l’action d’une source lumineuse. La NASA a ainsi développé une nouvelle technique de thérapie photodynamique utilisant des diodes électroluminescentes plutôt qu’un laser, favorisant une pénétration plus profonde de la lumière pour activer la molécule cytotoxique tout en réduisant le risque de dégâts collatéraux infligés par les lasers aux tissus sains.
Au pays, l’Agence spatiale canadienne (ASC) a financé deux projets développés dans le but de faciliter les diagnostics médicaux des astronautes. Il s’agit des projets Microflow et Lab on a CD. Le premier est un démonstrateur visant « la fabrication et l’essai d’un cytomètre de flux transportable de première génération destiné à l’ISS ». Un appareil portable permettrait d’aider les patients à mobilité réduite ou vivant dans une région éloignée. Lab on a CD est quant à lui un mini laboratoire d’analyses médicales permettant d’effectuer des diagnostics ultra rapides et automatisés.
La télémédecine, la grande bénéficiaire de la recherche spatiale
Finalement, une des grandes retombées technologiques de la conquête spatiale s’avère être la télémédecine. Fruit de la combinaison entre les technologies de l’information permettant des taux de transferts élevés de données et la technologie spatiale, la télémédecine a logiquement émergé quand les équipes au sol ont dû assister les premiers hommes dans l’espace avec les programmes Vostok, Mercury ou encore Apollo. En effet, avec des vitesses orbitales de 28,000 km/h à 400 km au-dessus du plancher des vaches, impossible d’envoyer un chirurgien rapidement en cas de problèmes de santé majeurs et encore moins à 380,000 km de la Terre, c’est-à-dire sur la Lune. C’est ainsi que depuis plusieurs décennies, la NASA, l’agence spatiale russe Roscosmos, l’ESA en Europe et le CNES en France ont mis en place des partenariats avec des institutions de recherches et des universités afin de transférer les technologies spatiales de médecine à distance à la médecine sur Terre. On pourra d’ailleurs lire cet article paru en 2001 dans la revue Telemedicine Journal and e-Health et qui traite de l’évolution de la télémédecine dans l’espace et ses retombées technologiques sur Terre.
On le voit, une part importante de l’innovation en santé est intimement liée à l’exploration de l’espace qu’il soit proche ou lointain. In fine, même s’il peut s’avérer difficile de quantifier le retour d’investissement apporté par la recherche spatiale dans le secteur de l’innovation en santé, nul doute que celui-ci s’avère positif.
Pour en savoir plus :
La NASA a créé un portail permettant de parcourir une base de données répertoriant les retombées technologiques (spinoff en anglais) de ses activités, notamment en santé/médecine.
À visionner : Une brève explication en vidéo du projet Microflow par Chris Hadfield, astronaute de l’Agence spatiale canadienne.
Auteur : Jérémy Bouchez Hinnovic.org
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